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8 février 2020 6 08 /02 /février /2020 11:58

Bonjour les amis,

Le 20 Janvier dernier j'avais lu un article sévère mais juste de mon ami  Fatizo sur 1917.

Mais, bien évidemment j'avais quand même envie de voir 1917, d'abord pour me former ma propre opinion, mais aussi parce que Sam Mendes est l'auteur d' AMERICAN BEAUTY que je considère comme le meilleur film de sa décennie.

Quand un auteur signe un chef d'oeuvre, on se dit que ses autres films ne peuvent pas être complètement mauvais (...et c'est le cas ici).

Par ailleurs, j'étais prévenu par Fatizo, donc, d'une certaine manière prédisposé à m'attacher aux qualités du film plutôt qu'à ses défauts.

Alors, allons-y pour ma critique, et commençons par le négatif.

Je confirme les appréciations de Fatizo. Le scénario tient en 2 lignes, il y a des invraisemblances (il n' y a pas de torrents dans le Nord de la France), certains personnages sont très creux et n'apportent rien à l'histoire, la majorité des dialogues sont plats, sans consistance...Et puis, surtout, le scénario est très prévisible de la première minute jusqu'à la dernière : le comble pour une oeuvre qui prétend rénover ce genre de cinéma.

J'ajouterai, dans les aspects négatifs, que l'image des soldats allemands est complètement stéréotypée : plus caricatural tu meurs...Dans ce film, les allemands sont de vrais machines de guerre, sans âme, ni compassion : on a droit, entre autres scènes, à un aviateur allemand qui poignarde un anglais qui lui sauve la vie...S'agissant de la première guerre mondiale on aurait aimé un peu plus de pondération de la part de Mendes : cette guerre des impérialismes n'était pas une lutte entre les bons et les méchants...

1917 de Sam Mendes...le parti pris de tout miser sur la caméra...

Alors, pourquoi faut-il voir 1917 malgré tout ?

La réponse est simple. Elle tient à la mise en scène et à la virtuosité de Sam Mendès avec sa caméra.

C'est son parti pris. Ce film est un hommage à l'action héroïque que mena son grand-père qui avait reçu pour mission de faire passer à un colonel un message du haut commandement destiné à sauver la vie de centaines de soldats : pour arriver jusqu'au colonel il devra risquer sa peau en traversant  un no man's land plein de dangers.

Nous sommes donc projetés au coeur des tranchées avec des longs plans-séquences extrêmement soignés, très nerveux. La guerre de 14 comme si vous y étiez...dans la peau d'un soldat de première classe chargé d'une mission vitale.

On plonge dans la boue, dans les flaques, dans les cratères de trous d'obus, entouré de cadavres et de rats, en tentant d'éviter les pièges tendus par l'ennemi. La réalisation est impeccable. On est saisi d'horreur, on retient son souffle.

Il y a aussi des scènes de nuit qui sont très oniriques et flamboyantes : des mouvements d'ombres et de lumières hallucinants et angoissants dans la nuit embrasée par les tirs d'obus et les incendies. Là, le spectacle devient tout simplement dantesque, horrible et grandiose : Mendes se transforme en Akurosawa de la première guerre mondiale.

Ces scènes-là, ces tableaux fantasmagoriques à eux-seuls méritent qu'on voie ce film...

1917 de Sam Mendes...le parti pris de tout miser sur la caméra...
1917 de Sam Mendes...le parti pris de tout miser sur la caméra...

Ajoutons qu'il y a aussi une certaine poésie dans ce film. La caméra sait s'arrêter sur des pétales de fleurs de cerisiers qui s'envolent, sur le vent qui agite les herbes folles au milieu de cette folie, sur notre héros qui récite un poème pour tranquilliser un bébé, sur un bataillon de soldats qui écoute un doux chant nostalgique parlant du désir de rentrer au pays juste avant de se lancer dans une bataille échevelée. Oui, le film réserve quelques moments de grâce, d'humanité au milieu de cette barbarie.

Si je devais résumer 1917 en trois adjectifs je dirais : épique, flamboyant, onirique...

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19 octobre 2015 1 19 /10 /octobre /2015 19:53

AVERTISSEMENT: ce billet révèle une des scènes-clés du film FURYO.

Bonjour les amis,

Aujourd'hui j'ai envie de vous parler de FURYO, du réalisateur japonais Nagisa Oshima, que j'ai vu lors de sa sortie en 1983.Je n'avais jamais revu ce film depuis lors et pourtant certaines scènes et situations sont restées définitivement gravées dans mon esprit, et notamment l'une d' entre elles sur laquelle je reviendrai toute à l' heure. J'ai juste pris la précaution de revisionner le film hier soir avant d'écrire ce billet.

Parlons de l'oeuvre d'abord, inspirée de deux ouvrages autobiographiques de Laurens van der Post : The Seed and the Sower (1963 ; littéralement : Le grain et le semeur) et The Night of the New Moon (1970 ; littéralement : La nuit de la nouvelle lune).

Voici ce que dit du film l'encyclopédie Wikipedia:

Le film raconte les relations interpersonnelles et les différences culturelles entre quatre hommes dans un camp de prisonniers japonais à Java durant la Seconde Guerre mondiale en 1942. Les personnages sont le major Jack Celliers (David Bowie), un prisonnier rebelle tourmenté par un secret coupable de jeunesse, le capitaine Yonoi (Ryūichi Sakamoto), le jeune commandant du camp entièrement dévoué à son pays, le lieutenant colonel John Lawrence (Tom Conti), un officier britannique qui a vécu au Japon et parle couramment le japonais, et le sergent Hara (Takeshi Kitano), qui semble être une brute mais qui possède encore un peu d'humanité et entretient une relation privilégiée et amicale avec Lawrence, rendue délicate du fait des conditions de guerre.

Le film aborde le thème du choc des civilisations dans un contexte particulièrement violent qui est celui d'un camp de prisonniers durant la seconde guerre mondiale. Le lieutement-colonnel John Lawrence parle couramment le japonais et sert de traducteur. Mais en fait, il est le seul personnage qui connaît les deux cultures et qui peut apporter un peu d'intelligence dans les rapports entre les anglais et leurs geôliers. Son rôle est particulièrement difficile car il y a de chaque côté deux cultures très fortes, pleines de préjugés et d'échelles de valeurs complètement distintes, quand elles ne sont pas directement opposées.

Les japonais traitent leurs prisonniers comme des lâches étant donné que pour eux, un officier qui a de l'honneur ne se rend jamais et préfère mourir. Un noble guerrier n'a pas peur de la mort et la préfère plutôt que de subir la honte d' être pris. Bien évidemment les anglais ont un point de vue tout à fait différent. Pour eux la guerre n'est pas terminée et il est hors de question de renoncer à l'idée d'une victoire finale...Ils ont perdu une bataille mais pas la guerre.

Le film parle du relativisme culturel et moral. Ce qui est blanc pour les uns est noir pour les autres et vice-versa. Le bien, le mal, l'honneur,la justice, le traitement humain des prisonniers sont perçus différemment de chaque côté.

Lawrence, le traducteur, essaie tout au long du film d'arrondir les angles, d'améliorer la cohabitation, d'éviter des horreurs inutiles et, finalement (et c' est le COMBLE) c'est lui (c' est à dire le personnage le plus humain et le plus intelligent) qui est finalement suspect tant aux yeux des japonais, que de ses compatriotes un peu butés qui le considèrent parfois comme un traître.

Le film montre bien à quel point les personnes trop imbues de la suprématie de leur culture sont foncièrement incapables de s'adapter à autre chose qu' à l'ordre impérialiste ou impérial dans lequel ils ont toujours vécu. La culture nationale et patriotique est parfois une façon de court-circuiter la pensée et de la rendre incapable de s'adapter à autre chose que ce qui a été inculqué dès le plus jeune âge sur les bancs de l'école.Elle devient une forme d'autisme et d'incommunication. La prouesse du film tient dans le fait que cette incapacité de communiquer est réciproque et marche dans les deux sens.

Le film fait penser à une réflexion que je me suis souvent faite moi-même: "A quoi ça sert d' avoir raison si je ne suis pas capable de le démontrer...". Face au fanatisme et aux préjugés la raison est parfois insuffisante. La stupidité et la violence sont toujours le chemin le plus court . Les personnes intelligentes comme Lawrence souffrent alors que celles qui sont butées vivent plus confortablement protégées par leur bêtise.

Le personnage de Lawrence est assez habile malgré tout et arrive parfois à instiller le doute. tant du côté japonais que du côté anglais.

Il y a aussi dans ce film une action secondaire qui est absolument remarquable. Jack Celliers (interprété par Bowie) qui est un brillant officier britannique va devoir affronter la mort, et avant qu' elle ne vienne le prendre il se sent hanté par un souvenir coupable. Quand il était jeune il s'était interposé pour défendre son jeune frère bossu d'agressions de jeunes bandes rivales. Le jeune frère paniqué était allé chercher secours auprès du pasteur et Celliers lui en a fait plus tard le reproche. Le jeune frère est atterré car il sent que son grand frère adoré a un peu honte de lui. Plus tard quand Jack Celliers est au lycée en terminale son jeune frère fait sa rentrée et doit subir un bizutage. Jack aurait pu intervenir pour lui éviter cette humilliation mais il a préféré laisser les choses suivre leur cours. Son très jeune frère avait une voix merveilleuse et ne chantera plus jamais après cet épisode traumatisant....Peu avant de s'éteindre Jack Celliers a des visions. Il retourne en rêve dans le jardin de leur enfance et voit son jeune frère arroser les fleurs .Il s' approche et lui demande pardon et son frère lui dit que tout va bien et qu' il n'a pas à s' excuser. On sent que le jeune frère admire et aime le grand frangin malgré la trahison...Il chante de nouveau pour lui.

Celliers sait qu'il a commis une faute impardonnable, qu'il a eu honte de son jeune frère à cause de sa malformation et que celui-ci l'a ressenti. Plus tard Celliers est devenu un brillant avocat et s'est éloigné de son jeune frère qui s' est occupé de la propriété des parents.C'est une grave faute d'orgueil et de manque d'amour qu'il ne peut réparer avant de mourir.

Voici cette scène qui m' a vraiment marqué...son frère lui pardonne et lui chante cette mélodie de l'enfance...seulement voilà, cette scène est rêvée...ce sont les dernières hallucinations d'une personne qui va mourir et qui n' a trouvé ni la paix ni le pardon. La guerre et la mort ne lui donneront pas l'occasion de réparer...Rarement je n' ai vu une scène qui précède la mort aussi intense.

Notez la voix magnifique du petit frère à 1 minute 36 secondes

Je vous remets l'adresse youtube au cas où on ne pourrait voir la vidéo à partir de mon blog.

https://www.youtube.com/watch?v=8EdHxza0k6w

J' aimerais vous dire que ce film recèle d'autres richesses, que le titre anglais " Merry christmas Mr Lawrence" fait référence à une scène assez époustouflante que je ne révèlerai pas , et que la fin du film est inattendue et absolument bouleversante. J'ai eu les larmes aux yeux, et même encore maintenant, cette scène finale je la trouve sublime et pleine d'humanité et de dignité.

J'aimerais juste ajouter également que l'interprétation pleine de sensibilité de Tom Conti en traducteur toujours pris entre deux feux est tout simplement géniale.

Allez, je vous laisse avec la superbe musique du film écrite par Sakamoto qui joue le rôle du capitaine Yonoi...notez les magnifiques percussions sur les bambous (à partir de 55 secondes)

La revoici interprétée en direct par le maître...

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