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24 janvier 2024 3 24 /01 /janvier /2024 11:32

Bonjour les amis,

J'ai fini cette semaine la lecture du livre d'Amin Maalouf intitué LE NAUFRAGE DES CIVILISATIONS, un essai en tout point passionnant qui m'en a beaucoup appris sur notre histoire contemporaine.

Quand Amin Maalouf met en perspective l'état de notre monde...

Voici un commentaire qui m'a paru très pertinent d'Apoapo sur la fiche babelio du livre qui présente mieux le contenu de cet essai que la présentation de l'éditeur. 

Encore une fois, et plus que jamais, Amin Maalouf assume sa place de conscience morale de notre époque. Cet essai, avant d'être une sonnette d'alarme prédisant les multiples menaces de naufrage qu'encourt l'humanité avec ses civilisations plurielles, est d'abord un livre d'Histoire du XXe siècle, ou plus exactement des cent dernières années. Il possède une thèse qu'il démontre avec brio : c'est bien la fin du monde levantin, et de ce creuset d'humanisme qu'il a incarné et alimenté, qui nous a précipité dans la tempête ; non que le système politique (ottoman ou en général impérial) fût idéal, mais parce que la situation anthropologique qu'il avait permis contenait des antidotes contre des forces mortifères qui se sont déchaînées depuis. Moi qui ai vécu dans et travaillé sur la levantinité ne peux qu'ajouter un attachement sentimental à mon adhésion intellectuelle à cette approche historico-politique.
Cependant, je reconnais que de l'extérieur l'on puisse se demander – critique qui a déjà été adressée à Maalouf – si ce n'est pas sa propre position, voire sa propre identité, qui lui dicte sa lecture ; si la démonstration et donc ses prédictions sobrement alarmistes ne se voient pas fragilisées par la centralité qu'il accorde, notamment, à l'histoire du monde arabe en particulier depuis Nasser. Je pense en particulier, comme l'auteur qui s'entoure de précautions, à ces deux phrases de la conclusion :
« Je demeure convaincu [...] que si le Levant pluriel avait pu survivre et prospérer et s'épanouir, l'humanité dans son ensemble, toutes civilisations confondues, aurait su éviter la dérive que nous observons de nos jours. C'est à partir de ma terre natale que les ténèbres ont commencé à se répandre sur le monde. » (p. 328)
En effet, le livre s'organise autour de quatre longs chapitres, dont les deux premiers se centrent sur le monde arabo-musulman. le Ier « Un paradis en flammes » traite des conséquences longues du démembrement de l'Empire ottoman sur la disparition du cosmopolitisme pacifique et humaniste, en particulier en Égypte et ensuite au Liban : une période dont l'auteur n'a pas été témoin mais récepteur du récit familial ; II « Des peuples en perdition » traite de l'avènement de la « haine de soi » chez les Arabo-musulman : il est question à la fois des guerres arabo-israéliennes, avec une centralité tout-à-fait particulière pour celle dite des « Six Jours » de juin 1967, et aussi du débat politique d'arrière-plan qui, parmi les musulmans à l'instar de tout le monde, se caractérisait par la dialectique pour ou contre le marxisme et le tiers-mondisme ; III « L'année du grand retournement », indique comme date emblème l'année 1979 : l'année de la révolution conservatrice de Thatcher et Reagan mais aussi celle de l'ayatollah Khomeiny en Iran, sans oublier (à un an près) celle du Parti communiste chinois de Deng Xiaoping ; année également de l'enterrement du projet du « compromis historique » en Italie suite au meurtre d'Aldo Moro, et du début de la chute de l'Union soviétique par son invasion catastrophique de l'Afghanistan, ayant produit l'apparition du jihadisme moderne globalisé qui a pour acte de naissance l'assaut de la grande mosquée de la Mecque (novembre 79) ; IV « Un monde en décomposition » se limite donc à relater certaines parmi les répercussions de ces événements qui, dans leur synchronicité, ont ouvert l'approche historique sur un angle mondial : conséquences de l'étrange renouveau de la croyance en la mystérieuse « main invisible » en économie, fragmentation des nations et nouvelles solidarités tribales et claniques, diffusion planétaire, par le changement du paradigme économique, de la corruption, de la fraude et de la rapacité, incapacité américaine de succéder à la bipolarité et méfiance mondiale envers toute tentative de gouvernance supra-nationale, tentations orwelliennes de renoncement à la liberté au profit de la sécurité, inaptitude à gérer les défis environnementaux et ceux des nouvelles technologies...
Pour ma part, même si l'on réfutait la thèse du livre, même si l'on contestait la position de l'observateur – journaliste avant de devenir auteur –, même si l'on doutait de ses conclusions au nom du principe « post hoc non est propter hoc », il resterait une analyse historique impeccable, possédant suffisamment de hauteur pour assurer la stature de l'Académicien (successeur de Claude Lévi-Strauss) que Maalouf incarne admirablement. Merci pour ce livre.

https://www.babelio.com/livres/Maalouf-Le-naufrage-des-civilisations/1120436

Voici une série de citations extraites du livre


« Je ne doute pas qu'il se trouve, sous tous les cieux, d'innombrables personnes de bonne volonté qui veulent sincèrement comprendre l'Autre, coexister avec lui, en surmontant leurs préjugés et leurs craintes. Ce qu'on ne rencontre presque jamais, en revanche, et que je n'ai connu moi-même que dans la cité levantine où je suis né, c'est ce côtoiement permanent et intime entre des populations chrétiennes ou juives imprégnées de civilisation arabe, et des populations musulmanes résolument tournées vers l'Occident, sa culture, son mode de vie, ses valeurs.
Cette variété si rare de coexistence entre les religions et entre les cultures était le fruit d'une sagesse instinctive et pragmatique plutôt que d'une doctrine universaliste explicite. Mais je suis persuadé qu'elle aurait mérité d'avoir un grand rayonnement. Il m'arrive même de penser qu'elle aurait pu agir comme un antidote aux poisons de ce siècle. » (p. 78)

« Je me suis souvent demandé s'il n'y avait pas eu, dans l'histoire du communisme, dès l'origine, un énorme sous-entendu, partagé de manière consciente ou inconsciente par les fondateurs, par les adeptes, comme par les détracteurs, et qu'on pourrait formuler comme suit : ce n'est pas seulement aux prolétaires que Marx a promis, en quelque sorte, le salut, mais également aux minoritaires, à tous ceux qui ne pouvaient s'identifier pleinement à la nation qui était censée être la leur. C'est ainsi, en tout cas, que beaucoup de gens ont compris son message. » (p. 98)

« Désormais, c'est le conservatisme qui se proclamerait révolutionnaire, tandis que les tenants du "progressisme" et de la gauche n'auraient plus d'autre but que la conservation des acquis. » (p. 170)

« J'ai dit que les régimes communistes avaient déconsidéré pour longtemps les idées universelles qu'ils étaient censés promouvoir. Je me dois d'ajouter que les puissances occidentales ont, elles aussi, abondamment discrédité leurs propres valeurs. Non parce qu'elles ont combattu avec acharnement leurs adversaires marxistes ou tiers-mondistes – cela, on pourrait difficilement le leur reprocher ; mais parce qu'elles ont instrumentalisé avec cynisme les principes universels les plus nobles, au service de leurs ambitions et de leurs avidités ; et, plus que cela encore, parce qu'elles se sont constamment alliées, particulièrement dans le monde arabe, aux forces les plus rétrogrades, les plus obscurantistes, celles-là mêmes qui allaient un jour leur déclarer la plus pernicieuse des guerres.
Le spectacle affligeant que la planète présente en ce siècle est le produit de toutes ces faillites morales, et de toutes ces trahisons. » (p. 206-207)

« Un monde apeuré, où la surveillance quotidienne de nos faits et gestes serait dictée par notre désir réel et légitime d'être protégés à chaque instant, n'est-il pas, finalement, plus inquiétant encore qu'un monde où cette surveillance serait imposée de force par un tyran paranoïaque et mégalomane ? » (p. 308)

Pour ma part ce livre a été instructif car il a complété mes connaissances très superficielles de certains événements importants de ces dernières décennies. Par exemple j'ai appris que c'est Churchill qui avait insisté auprès des américains afin que ceux-ci organisent un coup d'Etat contre le dirigeant modéré iranien Mohammad Mossadegh.,.. La suite vous la connaissez: il y a eu le Shah, puis sa chute qui amènera la première république islamique...

J'ai mieux compris aussi pourquoi c'est au Liban que l'OLP a cherché refuge dans les années 60: c'est le Roi Hussein de Jordanie qui a empêché son pays de devenir une base arrière des fedayins palestiniens, préférant créer une crise au sein du monde arabe plutôt que de céder.

Grâce à cet essai je comprends mieux  d'une part comment les orientaux nous perçoivent et la justification de certains de leurs ressentiments vis-à-vis de nous, et d'autre part comment s'articulent les rivalités maléfiques et funestes au sein du monde arabo-musulman.

En le lisant me sont revenues en mémoire des conversations que j'avais eu à Paris dans les années 80 avec des étudiants maghrébins, iraniens, libanais,etc...Ces derniers m'avaient peint une vision un peu édulcorée du Liban des années 60 et Maalouf  (tout en confirmant certains de ces témoignages de l'époque) complète le tableau en expliquant les comportements politiques qui allaient amener la tragédie...

Enfin, et c'est le plus important, le Liban est aussi une métaphore de notre planète. Ce pays avait réussi à vivre en paix sans qu'il n'y ait de graves heurts entre ses différentes communautés: les marronites, les druzes, les chiites, les sunnites, les juifs, les catholiques, les catholiques orthodoxes grecs, ceux de l'église arménienne...
Ça a été possible...On sait donc le genre de catastrophes que peuvent amener les replis identitaires.

Mais Amin Maalouf va plus loin et essaie de réfléchir sur ce qui fait que certains pays qui ont vécu des défaites ou des humiliations ont trouvé le moyen de se relever, et comment d'autres, au contraire, se sont enfoncés.

Son livre ne se veut pas désespérant. Je vous mets l'épigraphe du dernier chapitre de son essai ci-dessous:

 

Quand Amin Maalouf met en perspective l'état de notre monde...
Amin Maalouf

Amin Maalouf

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9 mars 2016 3 09 /03 /mars /2016 17:31

Bonjour les amis,

Pas de billet aujourd' hui non plus.Je vous adresse juste un petit clin d' oeil en passant et un sage conseil...

N' oubliez jamais, chers amis, qu' il faut savoir gérer ses conflits d' intérêt sans haine et sans violence.

Démonstration par l' image

Ne me dites pas qu' ils ne sont pas adorables ces deux-là !!!

Quand je vois ça, je me dis que si Hitler avait eu des hamsters dans son enfance, ça aurait pu changer sa vision et sa perception du monde, et donc le destin de l' humanité...

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24 janvier 2016 7 24 /01 /janvier /2016 12:01
Chanter c' est pas vivre mais c' est l' espérer...

Bonjour les amis,

J' ai eu l' occasion de voir François Béranger à la fête de l' huma à la fin des années 70.J' ai même pu le croiser et il m' a dédicacé l' un de ses albums.

Je n' ai jamais été un inconditionnel de ses productions qui étaient de qualité variable, mais il a écrit certains morceaux qui sortent vraiment du lot et que je n' oublie pas. Commençons par JOUE PAS AVEC MES NERFS.

Cette chanson très rock est un cri de révolte de quelqu' un profondément exaspéré de voir que l' humanité ne s' améliore pas, qu' elle est incapable de faire disparaître la barbarie de la face de notre planète.Les paroles ont été écrites dans un contexte international dur à la fin des années 70 lors de la première révolution islamique en Iran.Béranger est sidéré de voir qu' un personnage issu du moyen-âge puisse commander une nation entière.

Le Shah se fait virer

par un vieux puritain

sorti du moyen-âge

lançant des anathèmes

Plus loin il poursuit:

Pourtant ça comntinue

c'est ça qui est fantastique

Ça fait des millénaires qu' on respire le même air

Qu' on se tire dessus

comme des élastiques

Enfin il s' interroge:

J' pourrais être l' enfant

J' pourrais être le nazi

Quel est le Dieu vicieux

bien planqué dans les cieux

qui décide de tout ça

Qu' on lui tire la barbe...

Vous le voyez le contexte historique a changé mais la barbarie n' a pas été erradiquée, au contraire !

Pauvre Béranger qui serait sidéré s' il voyait les ravages commis par Daesh aujourd' hui.

Il nous a lancé un cri de desespoir, il a tenté de réveiller nos consciences mais il semblerait que tout reste à faire.Malheureusement en 2016 il m' arrive encore de fredonner ses vers rageurs.

" Joue pas avec mes nerfs.J' ai un flip de travers, une arête dans le gosier,J' peux plus respirer"

Sa chanson est restée d' une dramatique actualité...

Béranger nous a legué également un très beau texte d' une grande simplicité sur les chansons populaires.

"Tous ces mots terribles qui font des chansons" et qui sont comme la vie...pleines de tristesse, de mélancolie mais aussi d' espoir sans cesse renouvellé.

"Chanter c' est pas vivre mais c' est l' espérer..."

Et puis je vous laisserai avec une chanson d' une incroyable tendresse qu' on pourrait dédier à toutes les grands-mères qui nous ont tant aimés sans jamais rien attendre en retour...Magnifique texte et musique de Béranger qui, à travers un hommage à sa grand-mère, nous livre une chanson universelle.

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